Je vous propose dans cet article d’aborder l’art naïf, avec deux reproductions du peintre majeur de ce mouvement pictural, Henri Rousseau, plus connu sous le nom du Douanier Rousseau. Mes deux reproductions sont peintes à l’huile comme les originaux, et les dimensions sont dans un rapport proportionnel aux toiles d’origine.
La peinture naïve peut se définir comme instinctive (pratiquée par des artistes souvent sans formation), marginale (elle ne tient aucun compte des mouvements plastiques qui lui sont contemporains) et réaliste (représentation du monde).
L’art naïf se distingue par trois principales caractéristiques :
- refus des règles traditionnelles de la perspective,
- usage d’une palette de couleurs vives en aplat,
- attention portée aux détails.
Si le Douanier Rousseau est le peintre le plus connu de ce mouvement, on peut également citer Séraphine de Senlis, Bombois, etc…
La première toile est la « Charmeuse de Serpent« . Rousseau peint ce tableau en 1907, à la demande de la mère de l’artiste Robert Delaunay. Elle est actuellement exposée au Musée d’Orsay à Paris.
Cette toile représente une femme nue qui charme des serpents, vue à contre-jour, au clair de lune, dont on ne distingue que la silhouette et les deux yeux lumineux et qui peut être noire. Elle se trouve dans une jungle, au bord de l’eau. Ce tableau s’inscrit dans la thématique des jungles exotiques (comme le Rêve, et d’autres toiles), avec une flore exubérante et inventée (le Douanier Rousseau s’inspire des plantes qu’il voit au Jardin des Plantes). La lune argentée éclaire d’un fin filet tous les éléments du tableau. Le flamant rose est le seul élément peint dans un ton pastel. Les ondulations de l’eau soulignent la tranquillité onirique de la toile. La charmeuse est une figure allégorique, probablement liée à Eve dans le jardin d’Eden.
La deuxième est la « Bohémienne endormie« . Le Douanier Rousseau peint cette toile en 1897. Cette représentation fantasmatique d’un lion et d’une femme endormie un soir de pleine lune est une des peintures naïve les plus connues. Rousseau l’a présentée pour la première fois au public lors du treizième Salon des Indépendants, puis a essayé de la vendre au maire de Laval, sa ville natale, mais ce dernier n’en n’a pas fait l’acquisition. La toile est aujourd’hui conservée au Museum of Modern Art de New York.
Ce tableau est particulièrement mystérieux, étrange et poétique. La lune diffuse sa lumière d’argent sur le museau et la queue du lion qui, soit flaire effectivement la bohémienne, soit se trouve dans un monde parallèle où il ne peut tout simplement pas la voir. Il n’y a pas d’explication, et son mystère tient à ce qu’il n’y a pas de « solution » justement.
Jean Cocteau écrit à propos de ce tableau en 1926 : « Au fait, peut-être ce lion, ce fleuve, sont-ils le rêve de la dormeuse. Quelle paix ! La mystère se croit seul et se met tout nu […]. Ce n’est peut-être pas sans motif que le peintre qui n’oubliait jamais un détail ne marque le sable d’aucune empreinte autour des pieds endormis. La Bohémienne n’est pas venue là. Elle est là. Elle n’est pas là. Elle n’est en aucun lieu humain« .
Pour les surréalistes, ce tableau fut un référence dans laquelle ils trouvaient ce qu’ils s’efforçaient d’atteindre dans leur art : représenter non pas un monde réel, visible, mais ce qui est conservé par l’inconscient du peintre.